Taxis d’Abidjan – Le Va-et-viens

KoneCranes Abidjan

Légèrement endormie dans le taxi (c’est imprudent, ne le faites pas chez vous les enfants), je me laissais bercer par  l’allure de la voiture.
J’étais bien.
Une sonnerie est venue tout gâcher, celle du chauffeur.
Il décroche. Naturellement. Quoi d’autre ? Ici c’est Babi. Coucou Ophélie.
Par bribes et contrainte d’entendre, je note qu’il rassure quelqu’un à renforts de « j’arrive tout de suite ».
Il raccroche et lance pour lui-même : Ah, les femmes, elles sont toujours impatientes.
Puis, cette fois à mon attention : C’est quelqu’un à qui je donne des cours de conduite.
Moi : Ah (réponse de la meuf qui veut pas causer)
Lui : Elle va attendre un peu.  Je vous dépose d’abord et je fonce au quartier.
Moi : quel quartier ? (réponse de la meuf qui commence à être intéressée)
Lui : Port-Bouet.
Moi (dans ma tête) : Elle va attendre longtemps. On en route pour l’autre bout d’Abidjan.
Moi (à haute voix) : Vos cours de conduite, des femmes et des hommes qui se débrouillent le mieux ?
Lui : les hommes ! Les femmes, elles ont peur… ça me rappelle même d’ailleurs une de mes élèves. Paix à son âme. Une vraie peureuse. Un jour, elle a failli nous envoyer en brousse. Alors pour me venger, je lui ai demandé une fois arrivés sur un parking de s’entrainer à la marche arrière. Hors c’est un exercice fatiguant, surtout pour le cou, devoir regarder derrière et devant et derrière. Donc, je suis descendu et lui disait : Vas-viens, vas encore-viens,  vas-viens, vas-viens, vas-viens, …
Moi : …

Elle et Lui – 6

Elles ne sont rien toutes ses larmes qu’elle verse quelque fois.
Les larmes, elles sèchent.
Elle a lu un jour que la haine, la colère, la déception et tout un florilège d’émotions négatives étaient des émotions temporaires. L’amour, lui, restait.
Elle se souvient d’avoir ri.

Au début, elle a crié sur tous les toits ces maladresses, ces impairs et ces fautes. Après, elle a  cessé.
Elle a compris qu’elle ne partirai jamais. Elle n’avait pas peur d’une vie sans lui Elle ne voulait juste pas d’un bonheur sans lui. Elle avait tenu certains discours par le passé : « Celui qui me fait ça … » « Les hommes y’en a des masses… » Elle y croyait. Elle n’y crois plus.

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Taxi d’Abidjan – Les djihadistes

Le fameux soir où un camion a renversé son chargement au désormais fameux carrefour de Cap Nord,  je savais déjà qu’il me faudrait des plombes pour rallier la maison.
En conditions normales de température et de pression, les taxis détestent ma zone.
Mais là…
J’allais avec beaucoup de chance tomber sur un gaou ignorant tout du drame qui se déroulait plus loin.
Parenthèse.
Est ce une attitude malhonnête? Ceci est une réelle question.
Fin de la parenthèse.
J’ai eu mon gaou et je ne fus pas déçue.
Une vraie cacophonie.
Les chauffardeurs ivoiriens qui pratiquent déjà la magie noire à midi avaient enfin un VRAI prétexte.
Dès la Riviera golf, nous pénétrions au cœur des festivités.
Un gigantesque bourbier régi par la loi du plus fou.
Mon taxi n’était pas en reste, ce qui m’a bien aidée à arriver tôt.
Au niveau de Cap Nord, il avait l’intention de prendre le raccourci par Bonoumin sauf qu’il était impossible de tourner par le Carrefour de la Sainte Famille.
Sur ma gauche, un gbaka laissait là tous ses passagers désabusés.
C’est alors que le chauffeur a l’idée ingénieuse de passer par le parking de Cap Nord.
S’ensuit donc l’habituel contrôle. Boite à gants – coffre arrière.
Mon chauffeur. Mine serrée.
A peine ils ont refermé son coffre, qu’il leur balance: Vous là vous pouvez faire quoi si djihadiste vient même, « ken » même Etats Unis moyen pas la… Tchrrr

 

Elle et Lui

22 heures 15 minutes.

Une vibration.

Étouffe cette voix qui te rappelle qu’il ne pense à toi la nuit tombée.
Un message.
Une invitation sur le tard.
Comme souvent.
Fais semblant de ne pas remarquer qu’il ne t’a encore présenté à personne.
Ni ami, ni famille.
Trouve lui des excuses et dis-toi qu’avec le temps cela viendra.
Vite te rafraichir.
Eyeliner, escarpins et cette robe mise de côté au cas où.

Une vibration.

Il est devant chez toi.
Loin le temps où il daignait descendre de sa voiture.
Oublie qu’il ne reparle plus de tous vos projets du début.
Souris.
Fais l’impasse sur le fait qu’il te semble ailleurs.

ENTREE.

Son air grave. Son ton si sérieux.
Inspire.
Expire.

PLAT.

Acquiesce.
Surtout ne pleure pas.
Non, ne pleure pas.
Ne lui accorde pas cette faveur.
Il en va de ta survie.
Tu devrais lui répondre quelque chose.
Oui, nous restons amis. Oui, bien sûr.
Deux gorgées d’eau.
Contiens-toi.
Ta mère ne t’a donc rien appris.

DESSERT.

Évite de lui demander pourquoi il te ramène malgré tout chez lui.
Regarde le paysage qui défile au dehors.
La lune semble n’avoir jamais été aussi brillante.
Tout comme toi, elle aura sorti sa plus belle robe.
Agrippe-toi à ta bouée ton sac.
Un pied après l’autre, avance.
Convaincs-toi que tout va bien.
Répète toi que c’est normal.
N’oublie pas de sourire.
Laisse toi faire.
Ferme les yeux.
Amis. Oui, bien sûr.
Ses mains.
Son souffle.
Ses lèvres.
Son corps.
Amis. Oui.
Regarde, il s’est endormi.
Du repos du vainqueur.
Retourne-toi.
Maintenant et seulement maintenant, tu es autorisée à pleurer.
Pleure sur cette histoires qui ne rime à rien.
Pleure sur l’amour qu’il ne te rendra pas.
Pleure ta honte, pleure ta faiblesse.
Pleure en silence.
Pleure vite car déjà il se réveille.

Oui, Amis. Bien sûr.